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Viticulture bio : Travailler « pour quelqu’un qui viendra après »
Société

Viticulture bio : Travailler « pour quelqu’un qui viendra après »

08 Juil 2025

Avant de diriger le domaine d’Exéa, Anne Besse a toujours côtoyé des chefs d’entreprise. Comme chargée de clientèle dans une banque, après ses études à Assas (économie et économétrie). Puis comme expert-comptable et commissaire aux comptes, tissant « un lien privilégié avec des dirigeants très seuls », note celle qui a « besoin de travailler en équipe ». L’année 2015 rebat les cartes : ses associées partent en retraite et la famille sollicite la Parisienne pour reprendre, avec son frère et ses trois sœurs, le domaine viticole audois que pilotait son père. Le pape François publie l’encyclique Laudato si’, dont le chapitre sur l’écologie intégrale « cristallise parmi la fratrie une conscience vaguement formalisée mais bien présente. »

Par Laurence Madoui

L’aînée n’a « pas peur de gérer », d’autant qu’elle « (s)’entoure de spécialistes ». Mais la présidente s’accorde cinq ans d’exploration du terrain et de formation à la RSE, à la viticulture auprès d’un cousin et à l’œnologie à l’université de Dijon. Avant de restructurer le site quelque peu « endormi » où, enfant, elle séjournait l’été.

Les terres d’Exéa, du nom des ancêtres propriétaires depuis 1803, ont toujours vendu en vrac à des négociants. En 2020 débute la distribution en bouteille auprès de cavistes, restaurants et magasins, soit un tiers des volumes actuels devant devenir majoritaires d’ici 2030. Fin 2023, le Château Tour Montrabech, l’une des quatre cuvées, est classé B par le Planet Score.

De l’agropastoralisme à la biodynamie en viticulture

Exploitées en bio depuis 2010, les vignes occupent plus de 200 ha d’un seul tenant, surface préservant les 25 cépages des intrants de l’agriculture conventionnelle. Sur le vignoble doté de sources et longeant le canal du Midi, convergent les AOP Corbières et Minervois et l’IGP Pays d’Oc.

En 2017, 50 ha de vignes en fin de vie sont arrachés et replantés. Une décision prise avec « stress, même si cela fait partie du cycle » et « l’aval de toute la famille ». Des cépages résistants aux maladies et à la sécheresse (Muscaris, Soreli, Souvignier gris) sont introduits. Les rangs de vigne sont désormais enherbés et pâturés par des brebis de janvier à mars.

Quelque 15 000 arbres et arbustes plantés depuis 2021 abritent du vent et du soleil, retiennent l’eau dans le sol et hébergent une faune friande de nuisibles. « La chauve-souris apprécie l’eudémis », insecte ravageur. Après l’agropastoralisme et l’agroforesterie est envisagé l’agrivoltaïsme. La biodynamie, testée sur 15 ha, a vocation à s’étendre.

« [Je travaille] pour les générations d’après : actionnaires, salariés, consommateurs » – Anne Besse, présidente des domaines viticoles Famille d’Exéa

Depuis 2015, l’effectif a triplé et quelque 10 M€ ont été investis, notamment dans la modernisation de la cuverie pour un gain de 50 % sur la consommation d’eau. L’activité de promotion immobilière du père y a aidé.

« On avait cette capacité, on se devait d’aller dans cette direction », pose Anne Besse, citant l’ami de son grand-père, Paul Valéry : « Je travaille pour celui qui viendra. » Elle s’y emploie « pour les générations d’après : actionnaires, salariés, consommateurs ». Ses deux fils sont « plutôt fiers de l’engagement pris ».

Crédit photo de couverture : Michel Joly

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